C’est l’histoire d’une petit fille qui, à l’âge de trois ou quatre ans, reçut un cadeau de son père: une poupée en costume régional qu’il lui avait rapportée de ses vacances sur la Côte d'Azur. Ce premier -et dernier!- cadeau d’un géniteur pour le moins distrait enchanta la petite. À tel point qu’elle ne rêva dès lors que d’une chose: posséder elle aussi un joli costume niçois, qui représentait pour elle le summum de la beauté, de l’élégance, de la fraîcheur et de la grâce féminines. Son rêve ne se réalisa jamais : aux goûters masqués du Mardi Gras, malgré ses requêtes d'année en année plus insistantes, on l’affubla toujours d’autres déguisements, qui probablement plaisaient plus aux adultes.
Quarante-deux ans plus tard, les aléas de l’existence amenèrent celle qui avait tant rêvé de s'habiller en Niçoise à s’installer… à Nice, où elle vit encore aujourd'hui. Elle pouvait maintenant s’offrir le costume si longtemps et si ardemment désiré. Mais pour elle la saison était passée.
Quelle ne fut pas son émotion lorsqu'hier soir, rentrant chez elle à vélo, elle vit soudainement apparaître, au détour de Rauba Capeu, la matérialisation de son rêve enfantin : une dizaine de jeunes filles en fleur, fraîches comme une brise niçoise, qui s'apprêtaient à danser dans leurs ravissants costumes.
Décidément, les festivités du rattachement de Nice à la France ont du bon, et les cocoricos peuvent parfois avoir le goût délicieux des souvenirs heureux.