Autrefois
on parlait souvent de femmes-enfants, alors qu’aujourd’hui tous s’accordent à
reconnaître que ce sont les hommes qui ont le ont plus de mal à grandir.
L’hebdomadaire Newsweek de cette semaine
s’inquiète de la disparition de l’homo
americanus, remplacé par des gamins attardés: nous serions ainsi passés de "l'ère Cary Grant" à "l’ère Hugh
Grant", ce dernier (qui fêtera ses 50 ans cette année) étant sensé être le
prototype de l’éternel adolescent.
Le
kidult est le produit d’une
régression de masse qui concerne la société tout entière et semble étroitement
liée à l’importance que les nouvelles technologies ont pris dans nos vies. La
semi-hypnose face à un écran -qui indique une régression proche de l’état végétatif- concerne la population dans son ensemble, tous sexes confondus, à partir de 10
ou 15 mois jusqu’à… la fin.
Si le phénomène est aujourd’hui en constante progression, le kidult a toujours existé. Carl-Gustav Jung s’y est beaucoup intéressé et l’a appelé puer aeternus. Dans des temps plus récents, le phénomène a été décrit comme syndrôme de Peter Pan. Il s’agit dans tous les cas d’un éternel enfant qui, n’ayant pas réussi à se détacher de la Mère, aspire à revenir à un état d’inconscience et a du mal à entrer dans le monde. Condamné à l’instabilité et à une quête incessante et jamais satisfaite dont l’objet toujours s’éloigne, attiré par par toutes les nouveautés et tous les possibles, le kidult-puer aeternus n’arrive pas à s’enraciner, à entrer dans le temps et à vieillir.
Le
puer aeternus nous concerne tous,
dans des mesures différentes, et n’a pas que des aspects négatifs. Un «retour à la Mère» à
l’âge de la maturité peut être éminemment positif, car avec le temps le moi s’éloigne trop de ses racines inconscientes et en
vient à se raidir et à se stériliser. Pour rééquilibrer la situation, il faut
savoir s’exposer de nouveau à l’influence de l’inconscient, faire une sorte de
retour dans le "sein maternel" , écouter son «enfant
intérieur» pour renaître renouvelé, c’est-à-dire avec une conscience plus
large. Le «retour à la mère» représente un accès à l’autre versant
de nous-mêmes, au monde des images et
des potentialités intérieures. Tel est l’aspect potentiellement positif de la
régression.
*Courrier international- Hors-série mars-avril-mai 2010
« Pop Japan » p.38
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