Comme disent les Italiens (auxquels, soit dit en passant, nous ressemblons de plus en plus), "C'è sempre una prima volta": il y a toujours une première fois.
Ayant eu la chance de naître après les années honteuses de l'Occupation, c'est effectivement la première fois de ma vie que j'ai eu honte d'être française. Cette expérience pour moi inédite -et pas franchement agréable- est survenue il y a dix minutes, quand je suis descendue prendre mon courrier dans la boîte aux lettres. J'y ai trouvé l'hebdomadaire Newsweek, auquel je suis abonnée. Titre de couv: "Le nouvel extrémisme européen- Sarkozy et la montée de la droite dure".
L'article en question parle assez peu de Sarkozy et beaucoup de la Suède, qui héberge désormais dans son Parlement des membres du parti d'extrême droite xénophobe, ironiquement appelé "Sweden Democrats". Mais en dehors de toute considération sur son bien-fondé (en ce moment, Sarkozy fait vendre), cette couverture m'a fait l'effet d'un coup de poing. Et m'a remplie de honte et de peur. Tout comme me fait peur la passivité béate dans laquelle mes compatriotes -ou du moins bon nombre d'entre eux- semblent vouloir continuer à macérer.
"Sarkozy et Berlusconi se ressemblent" a dit récemment Ezio Mauro, qui sait de quoi il parle vu qu'il est directeur du quotidien La Republica, "ses idées sont dangereuses, car elles ne parient pas sur la raison mais sur la peur. Pour flatter un électorat qui lui tourne le dos, Sarkozy a choisi d'effacer son image d'homme de droite moderne, républicain, constitutionnel et européen". La France, figure de proue de la montée du populisme européen d'extrême droite ? Comment ne pas avoir honte, comment ne pas avoir peur?
Mais cette peur n'a rien à voir avec celle -sécuritaire et xénophobe- que Sarkozy, envahi par la panique, alimente sans bien savoir ce qu'il fait. Cette peur, toute simple, est la suivante: si la Gauche ne se ressaisit pas plus que rapidement, que pourrait-il se passer au second tour des élections présidentielles de 2012, sinon une alliance de fer entre l'actuel président et la fille de Le Pen?