Ici aussi le problème me semble mal posé: il ne s’agit pas tant de déterminer comment fonctionnent les neurones de madame Bettencourt, mais de faire face à un problème poignant qui concerne ou pourrait un jour concerner beaucoup d’entre nous: l’extrême vulnérabilité affective des « vieux » vis-à-vis de quiconque se montre disposé à s’occuper d’eux.
Ce manque de lucidité -et sa conséquence: l’excessive générosité vis-vis d'étrangers- dépendent souvent d’un manque d’humilité de la part des victimes, incapables d’imaginer qu’on puisse les fréquenter pour leur argent et rien d’autre, et que l’affection qu’on leur montre n’a d’autre but que de les saigner à blanc. Ajoutez-y l’ennui et le spectre de la solitude, qui affligent tous ceux qui n’ont pas su préparer leur vieillesse et n’ont jamais appris à faire bon ménage avec eux-mêmes : vous avez la porte grande ouverte au premier prédateur qui passe. Souvent négligés par leurs enfants, auxquels ils n’ont pas su donner en temps voulu l’attention et l’amour que ceux-ci étaient en droit d’attendre, les vieux corbeaux et les vieilles corneilles se morfondent sur leur tas d’or. Prêts à oublier que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute, que le monde est plein de rusés renards aux aguets, et que la catégorie des prédateurs augmente au même rythme que celle des seniors fortunés.
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