«Le pessimisme est d'humeur; l'optimisme est de volonté» Alain
Imaginons qu'en ouvrant les volets le matin, je vous dise: «Journée faste». Comprenez-vous que le soleil brille ou qu'un trèfle à quatre feuilles a poussé sur le balcon? Ou n'entendez-vous pas plutôt «Jour néfaste», en en déduisant qu’il pleut... ou que j'ai vu passer un chat noir?
*«À la recherche du Soi» La Table Ronde 1977
Journée faste - Jour néfaste: le sens est opposé mais le son est identique: ce n’est donc pas votre ouïe qui est en cause. Ce n’est pas non plus votre capacité de déduction à partir de l'observation d'un fait, car c’est moi qui ai regardé dehors et non pas vous. Ce que vous entendez est une interprétation, une projection de votre Weltanschauung ou -pour parler plus simplement- de votre tempérament. Entendre «jour néfaste» indique une naturelle inclination -une humeur, dirait Alain- pour la face obscure des choses. Entendre «journée faste» révèle une tendance à positiver, à préférer la face lumineuse, quelles que soient les circonstances.
Et voilà ce que dit Arnaud Desjardins sur notre façon d’interpréter ce que nous transmettent nos sens (ici il ne s'agit plus de l’ouïe, mais de la vue).
«Dans la pénombre du crépuscule, marchant dans un champ, je vois un serpent. En fait, il n’y a pas de serpent, il y a une corde et je l’ai prise pour un serpent. Je crois qu’il y a un serpent, je suis convaincu qu’il y a un serpent, je vois un serpent… Le serpent, c’est ce que mon mental me fait croire….»
Et il en conclut:
«C’est en étudiant le serpent qu’on peut voir la corde, c’est en étudiant réellement ce monde phénoménal qu’on peut découvrir qu’il s’agit d’un subterfuge, et c’est en étudiant l’égo réellement qu’on peut s’en libérer. Généralement l’égo disparaît après qu’on s’est beaucoup intéressé à lui»*.
Que ferait le sage en m’entendant dire «jour-née-faste?» Il mettrait son ego dans sa poche, se garderait de toute interprétation… et irait à la fenêtre voir le temps qu’il fait.
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