Le premier à me parler du "vampire" fut un moine bouddhiste. En août 2005 j’étais allée interviewer Lama Denys pour mon livre « Bouddhisme au quotidien ». Voici ce que m’avait expliqué le fondateur et supérieur de la Sangha Dachang Rimay, dans la magnifique chartreuse d'Arvillard en Savoie :
« Ce que nous vivons actuellement est une lutte sans merci entre Gaia, notre Terre nourricière, et le « vampire ». Par vampire, j’entends tout ce qui n’est pas du ressort de l’économie réelle. On est dans l’économie réelle tant que la richesse est directement liée à des activités qui produisent des biens concrets : des biens que nous pouvons voir et toucher et dont l’utilité paraît évidente … . Aujourd’hui notre système est dominé, phagocyté par le vampire, c’est à dire l’économie virtuelle, purement spéculative, qui dicte sa loi de façon autonome et se nourrit d’elle-même. La puissance économique d’un État n’est plus reliée à quoi que ce soit de réel mais dépend des profits générés par des entités inexistantes -fluctuations des bourse internationales, fonds d’investissement et autres « produits financiers ». La croissance de cette « bulle virtuelle » est exponentielle : jour après jour, elle continue à gonfler et si nous n’arrivons pas à l’interrompre nous allons à la catastrophe. Mais en imputer la faute aux autres ne sert à rien car nous sommes tous impliqués : chaque fois que nous faisons une opération financière, même la plus modeste, nous contribuer à gonfler la bulle, nous nourrissons le vampire… ». ("Bouddhisme au quotidien" Hachette 2005 p.83-84).
Six ans plus tard, ces paroles sont tragiquement confirmées par les faits et reprises par tous les médias.
« Les marchés sont devenus une machine infernale où se sont engouffrés les spéculateurs prêts à parier sur la faillite de tout un système... Certains intervenants continuent de financer l'économie. Mais d'autres spéculent. Ils n'achètent plus de titres en fonction de perspectives économiques, mais en fonction d'incidents sur une journée, susceptibles de leur rapporter beaucoup d'argent !"
Que peuvent aujourd'hui nos banques centrales, notre FMI, nos gouvernants et toutes nos institutions? Bien peu de choses en vérité. Et Jean-Claude Trichet, président de la Banque Centrale Européenne, peut toujours déclarer que "l'euro est une monnaie crédible": les nouveaux maîtres du monde s'en moquent comme de leur première transaction. (Je recommande à ce propos l'excellente interview de l'économiste Jacques Généreux sur France Info).
Pour survivre au vampire, il faudrait plus que les vœux pieux de nos dirigeants: il faudrait une intervention de la divine providence.
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