«Dans l’âge de Kali les hommes vils qui auront acquis un certain savoir (sans avoir les vertus nécessaires à son usage) seront honorés comme des sages» Lingä Purânä
La scène remonte à samedi dernier. Lieu: en bord de mer, sur les rochers du Cap-Ferrat (A-M). Personnages: deux trentenaires (un gars, une fille).
Au moment précis où j’achevais une descente verticale assez périlleuse et m’apprêtais à atterrir sur les rochers en question, le garçon disait à la fille:
«Oui, mais c’est parce que j’ai un cotche» (lisez: coach). J’ai évidemment dressé l’oreille.
-Elle, d’un ton très intéressé: «C’est vrai??? Toi aussi?».
-Lui: «C’est lui qui m’a aidé à sortir de ce délire. Il m’a fait comprendre qu’il n’y avait plus d’amour, que c’était moi le demandeur et qu’elle ne donnait plus rien. J’étais allé le voir pour réussir à me libérer de cette situation. Maintenant c’est résolu. Aujourd’hui on parle de tout avec mon cotche».
Cette scène m’a frappée parce qu’on aurait dit l’illustration en live de ma note de la semaine dernière. Le ton faussement désinvolte du garçon, l’intérêt immédiat de la fille, ravie de communiquer à un potentiel futur petit ami qu’elle aussi avait son coach, m’on fait réaliser tout d’un coup que les psychothérapeutes -les vrais, les sérieux- ont aujourd’hui de redoutables concurrents: les coachs, qui surfent sur la dépendance psychologique des gens, sur leur besoin de se raconter mais aussi sur leur refus d’affronter vraiment leurs problèmes. Pour certaines personnes, dire «je vois un psy» équivaudrait à un constat de fragilité psychique, alors que dire «j’ai un coach», c’est communiquer qu’on est branché, qu’on fait comme les stars du showbiz et les grands hommes d’affaires. Avoir un coach est un status-symbol.
Beaucoup vont chez leur coach comme on va chez son garagiste: dans l’espoir de réparer un problème spécifique et redevenir immédiatement opérationnel. Mais si beaucoup restent scotchés à leur pseudo-gourou après que leur problème ait été «réglé», c’est parce qu’en réalité ils n’ont rien réglé du tout. Ils sont par contre devenus dépendants d’individus qui -sauf exceptions- n’ont ni les connaissances ni l’expérience nécessaires pour pouvoir vraiment les aider à évoluer… mais ont en revanche une remarquable capacité à entretenir un état de dépendance chez leurs clients, source de revenus réguliers. On est très loin des enseignements de Freud, Lacan et Jung, qui doivent s’en retourner dans leurs tombes.
Et quand les coachs auront fait leur temps -car eux aussi sont destinés à disparaître-, quelle nouvelle étrange profession viendra les remplacer? Une chose est certaine : le temps des faux prophètes et des faux gourous ne fait que commencer…et il va falloir de plus en plus de discernement pour distinguer le bon grain de l’ivraie .
Chère Nathalie,
Le problème des mots-valises, c’est qu’on y met n’importe quoi de à l’intérieur… Chacun voit derrière le mot coach ce qu’il veut, du bien comme du pire.
En vous attaquant aux coachs de cette façon vous tombez aussi dans la simplification abusive que vous critiquez. La vague des coachs vient, à l’origine, du monde sportif (les entraîneurs), et du monde de l’entreprise (les consultants). Pour la plupart de ces professionnels les méthodes sont sophistiquées et efficaces. Mais comme dans tous les métiers il y a des mauvais et il y a ceux qui abusent. De nombreux coachs sont eux-mêmes psychologues. Certains sont mêmes plus largement formés que nos petits psychologues universitaires Bac +4 ou 5.
Concernant les soi-disant « psychothérapeutes -les vrais, les sérieux » , cette phrase « qui surfent sur la dépendance psychologique des gens, sur leur besoin de se raconter mais aussi sur leur refus d’affronter vraiment leurs problèmes. » s’appliquent très bien à eux également.
Que dire des psychanalystes sur lesquels aucune étude scientifique sérieuse n’a pu apporter une quelconque preuve de leur efficacité. En quoi, parler quasiment dans le vide pendant de nombreuses années, à récurer le passé, peut apporter une résolution efficace des problèmes du moment. N’y-a-t-il pas dépendance et snobisme dans ce long corridor ?
Les thérapies courtes et comportementales, peuvent être utilisées par des coachs expérimentés dans des cadres professionnels et personnels. Elles apportent des résultats rapides et durables. Arrêtons de croire qu’il faut souffrir longtemps pour nécessairement dégager des résultats positifs. C’est une valeur du passé et dépassée. Le monde d’aujourd’hui bouge tellement qu’il faut surtout apprendre à s’adapter en permanence. C'est-à-dire apporter des solutions régulières et rapides à la situation du moment. Puis passer à autre chose.
Rédigé par : Christophe Vigliano, Marketae.com | mercredi 20 juin 2007 à 08h05