CE MATIN, À LA GARE.
Devant la billetterie, un jeune homme attend sagement son tour, sa fille dans les bras. La petite, trois ans environ, est accrochée à son père comme une moule à son rocher. La tête appuyée contre sa poitrine, les yeux fermés, la tétine dans la bouche, elle tète avec concentration et volupté. De temps en temps, comme les nourrissons au sein, elle ouvre les yeux et plonge son regard dans celui de son père, l’air béat.
Lui, la bouche appuyée sur le crâne de sa fille, la couvre de petits baisers ininterrompus, presque mécaniques, comme s’il la broutait. Pendant les cinq minutes qu’a duré l’attente, les baisers paternels ne se sont jamais arrêtés, et la petite n’a jamais cessé de téter. Autour, les gens regardaient la scène d’un air attendri («comme ils sont mignons, ces jeunes papas d’aujourd’hui!»).
Mais devant ce père qui jouait à la mère nourricière, et cette enfant de trois ans qui jouait au bébé non sevré, j’ai ressenti un certain malaise.
Bonne année du buffle !
Rédigé par : VisiteurDeBlogs | lundi 26 jan 2009 à 11h00
Essayait-il à force d´abondance et de démesure de rattraper le fameux retard? C´est Cyrulnik qui dit dans " Sous le signe du lien" que le père a beau faire, il aura toujours et de toute manière 9 mois de retard sur la mère...
Rédigé par : Claudie D. | jeudi 29 jan 2009 à 19h49
Il a neuf mois de retard, la nature l'a voulu ainsi. Pourquoi vouloir remettre en question ce qu'a voulu la nature? Peut-être ferions nous mieux de l'observer un peu plus, elle a tellement de choses à nous apprendre. Les sages de la Chine ancienne ne s'y sont pas trompés: tout leur savoir dérive d'une observation constante de la nature, de ses rythmes et de ses lois.
"L'homme imite la terre.
La terre imite le ciel.
Le cile imite le Tao.
Le Tao n'a d'autre modèle que soi-même".
Dao De Jing
Rédigé par : Nathalie Chassériau | samedi 31 jan 2009 à 10h14
Bonjour,
je n'ai pas assisté à la scène que vous décrivez, pourtant je me pose une question : outre le rapport effectivement ambigu entre ce papa et sa petite fille (ambigu au sens physique, cette sorte de fusion qui se voudrait organique entre le père et l'enfant) ne peut-on y voir un lien légèrement incestueux plutôt que confus ? Ne serait-ce pas là que se dissimulerait le sentiment dérangeant d'un spectacle à peine malsain ? Il existe des pères tendres sans excès (surtout en public.) Ou bien, c'est moi qui projette ?
Enfin, je n'étais pas là.
Rédigé par : VisiteurDeBlogs | samedi 31 jan 2009 à 11h07
Cette scène m’a gênée d’autant plus que ce n’est pas la première du genre: j’ai l’impression que de nos jours, on tend à trop tripoter les petits enfants (surtout les pères): l’affection est une chose, le tripotage systématique en est une autre. Il y a dans cette façon de les embrasser de façon répétitive et un peu mécanique quelque chose qui m’évoque le pianotage sur le téléphone mobile: un passe-temps dans les moments où l’on est en attente, où l’on ne sait pas quoi faire. Le problème, c’est qu’un enfant est une personne, pas un téléphone mobile.
Rédigé par : Nathalie Chassériau | dimanche 01 fév 2009 à 09h29