Ce matin, en allant sur Google, les usagers ont pu découvrir le charmant logo ci-dessus (cela s'appelle un doodle: modification du logo de Google). Une branche chargée de cinq appétissantes pommes rouges, dont chacune a été mordue d’un gourmand coup de dent par un internaute -vous et moi, par exemple- bien trop affamé de savoir universel pour prendre le temps et la peine de choisir ce qui lui convient le mieux (mieux vaut, selon Google, goûter à tout et ne s'attarder sur rien)*.
Comble du raffinement ludique: trois secondes exactement après l’ouverture de la fenêtre, une des pommes se détache, tombe par terre, rebondit gracieusement puis finalement s’arrête, telle que vous la voyez et telle qu'elle atterrit, un beau jour de 1666, sur la tête du jeune Isaac Newton, lui permettant de découvrir la loi de gravitation universelle.
Comme disent les Italiens, meditate, gente, meditate… Avant tout autre considération, cette innocente branche de pommier nous suggère déjà deux attitudes incompatibles entre elles et facilement conflictuelles: l’intelligence de l’homme et son infinie soif de savoir (Newton) et l’ incapacité du même à résister aux tentations (Ève).
En allant sur Wikipedia (toujours grâce à Google, of course), on apprend que «depuis Einstein et la relativité générale, la gravitation n'est plus perçue comme une force d'attraction, mais plutôt comme une manifestation de la déformation de la géométrie de l'espace-temps sous l'influence des objets qui l'occupent».
Mais là n’est pas la question. La question est l’incroyable pouvoir de séduction des outils informatiques en général et de l’internet en particulier, et les innombrables armes auxquels ils recourent pour nous charmer chaque jour un peu plus, et chaque jour un peu plus nous hypnotiser. Le plus souvent, la part de nous-même sur laquelle cette séduction opère est la région la plus infantile, la plus brouillonne et la plus superficielle du psychisme humain, celle qui a du mal à fixer son attention et se distrait pour un rien. Il en faut peu pour distraire un petit enfant de ce qu'il fait: un bonbon, un joujou de pacotille, trois p’tites notes de musique -sans oublier bien sûr un écran allumé- et le tour est joué: le bambin est conquis, prêt à avaler tout ce que vous lui direz et à vous suivre au bout du monde.
C’est ainsi qu’à force de sollicitations et de séductions faites de musiques débiles, d'applications inutiles, de jeux puérils et de petites trouvailles ludiques aussi charmantes que superflues, nous régressons -lentement, sûrement et inconsciemment- chaque jour un peu plus… pour nous arrêter où? On peut regretter que la farceuse petite pomme de Google, au lieu de s’immobiliser en un point X d’un sol virtuel, ne nous tombe pas... en pleine poire: pour sortir de l’état de semi-hypnose dans lequel nous plongent nos merveilleux écrans, nous allons avoir besoin de fréquents petits coups sur la tête.
*Maintenant que j'y pense, la pomme mordue, c'est le symbole d'Apple! Qu'est-ce qui se cache derrière ce clin d'œil de Google?
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